Jan
3, 2021
Rennes – Elemento Records : « Il y a beaucoup de collectifs mais encore trop peu de femmes aux commandes »
Quel plaisir que de voir les initiatives féminines se multiplier et notamment dans la sphère professionnelle, dans les coulisses, afin de se tirer toutes ensemble, vers le haut. Cette fois-ci c’est la Bretagne à l’affiche, avec Elemento Records, qui vient tout juste d’éclore. Mots clés : Agence, label, collectif, 360.
Photo en une : l’artiste Jean Terechkova
PWFM – Bonjour, pouvez-vous présenter en quelques lignes Elemento Records ?
L’équipe – Bonjour, Elemento part d’un constat : celui de la sous-représentation de la gent féminine dans le secteur professionnel culturel, quelle que soit la chaîne de création artistique et notamment dans la musique. Elemento Records est un label et collectif artistique rennais composé à 99,9% de femmes.
Nos quatre activités principales sont l’accueil et l’accompagnement des artistes pour le développement de leur carrière, la production musicale ainsi que le booking et l’organisation d’événements pluridisciplinaires (musique, street art, arts visuels, spectacle vivant).
Nous voulons proposer aux organisateurs.trices, un roster composé de femmes, personnes trans et non-binaires avec une ligne artistique aux esthétiques qui se recoupent entre la techno, la trance, l’industrielle, l’acid, la hardtrance et le hardcore. Quant au collectif artistique, nous voulons permettre à tout.e.s de créer, mais aussi de rassembler tou·te·s les acteur·trice·s du milieu artistique afin de créer une cohésion, l’objectif étant d’intégrer le public comme acteur majeur de nos rassemblements.
Nous voulons à travers ce projet, valoriser les femmes, personnes trans et non binaires, l’inclusion, le partage et la liberté.
Qui est derrière le projet ?
Le projet Elemento Records, c’est 4 copines, 4 femmes, 4 personnalités ; Charline, Emilia, Léna, et Marie. Toutes passionnées d’art et plus particulièrement de musique, nous gravitons dans le monde de la culture depuis toujours et sommes aujourd’hui impliquées dans le milieu de l’événementiel, de la technique et de l’artistique. Au fur et à mesure, notre équipe s’est étoffée avec l’arrivée de 7 autres personnes, toutes ayant des compétences et des disciplines de prédilections. Nous comptons donc dans les rangs d’Elemento, des femmes spécialisées dans le domaine du conseil des droits d’auteur, dans la photographie, le graphisme, la communication, la vidéo/mapping, la régie technique, la technique lumière et la scénographie. C’est l’ensemble de l’équipe qui contribue à la création et à la viabilité du projet.
Pourquoi monter une structure à 360° et à 99% féminine ?
Nous voulons montrer qu’il est totalement possible d’avoir des femmes à tous les postes tant au niveau artistique que logistique ou administratif. Le chiffre de 99% rejoint ce principe, en montrant qu’un label et/ou un collectif peut être féminin et que les femmes sont bien présentes dans ce secteur. Nous ne sommes bien évidemment pas contre le fait de travailler avec des hommes, c’est d’ailleurs le cas pour quelques projets, notamment autour du graphisme. On y pense également pour la suite du projet avec d’éventuelles collaborations.
Ce chiffre, qui est voué à évoluer, représente une symbolique forte car notre volonté première est que ce milieu et notre société en général ne se cantonnent plus au masculin/féminin et qu’il n’y ait plus d’étiquettes. Nous voulons que toutes personnes, quelque soit son sexe et/ou son genre, soient considéré·e·s avant tout comme artistes et passionné·e·s, et aspirons à collaborer les un·e·s avec les autres en harmonie. C’est cette vision des choses qui nous anime.
Pensez-vous qu’il soit nécessaire d’avoir des espaces en non-mixité ?
Oui totalement, c’est un outil nécessaire pour échanger et créer des synergies nouvelles. Ces espaces permettent à celles qui le souhaitent de se tourner vers des personnes qui vivent et comprennent leur ressenti. Dans le cas de la création artistique, ce sont des espaces qui sont nécessaires pour rassurer, pour créer en confiance, parler et s’écouter sans jugement. Ce genre d’espaces bienveillants peut aussi motiver d’autres filles, personnes trans et non-binaires à se lancer. Cependant, nous ne souhaitons pas être seulement un espace de non-mixité : nos événements seront ouverts à toutes et tous par exemple.
Où en sommes-nous de la place des femmes dans l’électro à Rennes et en Bretagne ?
Les artistes féminines émergent, mais elles sont parfois seules, c’est-à-dire pas forcément incluses dans un collectif. Elles doivent systématiquement redoubler d’efforts pour accéder à la scène électro rennaise qui peut être souvent cloisonnée. Il y a beaucoup de collectifs mais encore trop peu de femmes aux commandes. Ce constat se fait aussi bien au niveau national, régional, qu’au niveau local, où les femmes sont une fois de plus sous-représentées, ne serait-ce que dans les programmations en bars et en clubs. Cette disparité est ancrée indépendamment de la volonté des personnes et ce n’est que depuis quelques années que les consciences s’éveillent sur les inégalités dues au genre. Certains collectifs bien installés dans le paysage breton se sont emparés de la question et cherchent à comprendre les mécanismes d’exclusion, entendre nos questionnements et à évoluer dans le sens de la parité. C’est plutôt une bonne nouvelle.
Vous parlez notamment de safe space, pourquoi ?
Notre volonté est de créer des espaces d’expressions libérés des conditionnements de la société. Ces espaces peuvent être non-mixtes. Le principe est surtout d’assurer le bien-être et la sécurité de toutes les personnes qui participent à un projet ou un événement, que ce soit le public, les artistes, les technicien.ne.s, les bénévoles, les organisateur.rice.s, etc. Simplement, les discriminations et les violences quelles qu’elles soient sont bannies, et nous souhaitons que tout le monde le comprenne et sache réagir. Cela passe alors par la communication et la prévention en amont et sur place, mais aussi par la mise en place de dispositifs adaptés à chaque situation. Une association qui nous a fait mettre des mots sur ces faits et comprendre tous ces besoins, c’est Consentis. Nous savons aussi que, lorsqu’il sera nécessaire de se former davantage, iels seront là pour nous aider.
Vos objectifs en 2021 ?
En 2021, nous voulons mener à bien des projets collaboratifs en cohésion avec la sphère culturelle – en espérant que la situation sanitaire s’améliore.
Pour l’instant, nous avons quelques projets concrets qui verront le jour au début de l’année. Les collectifs Microsillon et Impact invitent 4 de nos artistes à jouer le 23 janvier prochain pour leur événement 23h59, en direct de La Fabrique à Laval.
Du côté du label, notre première Various Artist Trance, Acid et Rave sortira le 9 février, notre série de podcasts débutera le 12 janvier, et une prochaine Various sortira fin avril.
Concernant les concerts et les spectacles, nous sommes en contact avec plusieurs associations pour collaborer sur des événements à partir de juillet. Nous pourrons en dévoiler plus prochainement… Et bien sûr, nous sommes ouvertes pour d’autres collaborations !