A l’occasion d’une nouvelle collaboration avec Itinéraire Bis pour l’Attrape Rave #3, Constance De Gabory, scénographe, nous dévoile ses quelques secrets ! Forte de ses expériences auprès de son association AK303, la jeune parisienne fait ses armes auprès des collectifs Newtrack, Parallèle, Goosebump, avant de recevoir ses premières commandes de l’Elysée et de la Fashion Week.
PWFM – Bonjour Constance ! Pouvez-vous vous présenter aux lecteurs de PWFM ?
Constante – Je m’appelle Constance, j’ai 25 ans et je suis scénographe à mon compte. Je me suis lançée à plein temps depuis presqu’un an maintenant. Je fais de la scénographie avant tout événementielle, pour des teufs électros, mais pas que.
Comment êtes vous devenue scénographe ?
Lorsque j’étais en master à Sciences po, j’ai commencé à organiser des teufs avec le collectif AK303 dont je faisais partie, en amateur. J’ai pris l’habitude de vider les stocks de guirlandes d’Emmaus pour décorer les friches où ont allait poser du son, puis de fil en aiguille, j’ai commencé à créer des petits éléments de décors, avec de la récup. J’ai fais pas mal de « test » sur mon temps libre, en décorant les soirées de mon collectif. Puis j’ai fais un stage auprès d’une pote qui m’a transmis certaines notions relatives à la scénographie, et qui m’a permis d’élargir mon champ de vision à ce sujet. Diplômée, j’ai décidé d’aller m’installer à Paris pour chercher des opportunités dans ce milieu. J’ai pris un job alimentaire, et j’ai rencontré Parallèle, qui m’a accueilli à bras ouverts et qui m’a porté dans mes projets. Cela m’a permis de prendre confiance en moi, de progressivement voir plus grand, d’acquérir des compétences et de rencontrer beaucoup de gens. Et aujourd’hui j’en vis presque.
Vous proposez une scénographie immersive, autour de l’univers du rêve, comment jouez-vous avec la perception des spectateurs ?
J’essaie de créer des éléments de décor à taille humaine. Non seulement pour que le spectateur soit directement immiscé au sein de l’univers choisi, mais aussi pour qu’il devienne acteur, qu’il entre dans ce décor, et qu’il puisse jouer avec. J’aimerais beaucoup développer des installations interactives aussi.
« L’idée c’est de plonger le public dans un univers donné, de le faire voyager, en stimulant tous ses sens. »
Mon but c’est de surprendre le spectateur, de le perturber, et bien sur de le faire triper. Evidemment c’est plus compliqué de mettre cela en pratique, à cause des budgets alloués qui sont la plupart du temps trop bas pour me permettre de pousser l’expérience aussi loin.
Quelles sont les étapes importantes pour mettre en place un décor ? Combien de temps cela peut-il prendre ?
Je passe par trois grandes étapes : la phase de création, où, après avoir visité le lieu, rencontré le client et cerné ses attentes, je crée les différents éléments de décors qui seront mis en scène durant l’événement. J’élabore un dossier de présentation pour que le client se rende compte au mieux du rendu, et je rédige le devis. Une fois le devis validé et le contrat signé, je passe à la phase de construction, où je fabrique dans mon atelier les différents éléments de décors. Enfin, la dernière phase c’est l’exploitation, avec la livraison des décors, le montage et le démontage.
Je dirais que pour une soirée lambda, je travaille toujours au minimum une semaine au total (3 jours de création, 2 jours de construction, 1 journée et demie de montage/démongtage). J’aurais pu décider de concevoir une grande structure unique et la proposer à différents événements, mais j’aime l’idée de créer une scénographie unique sur mesure, en fonction d’un lieu, d’un client, d’un contexte. Evidemment cela ne me facilite pas la vie ahah.
Vous êtes fondatrice du collectif Acid Karnage 303, pouvez-vous nous en toucher quelques mots ?
Quand j’étais en Master à Sciences po Lille, avec des potes on a commencé à organiser des teufs un peu en mode « free » dans des friches abandonnées. On faisait pas mal d’urbex pour trouver des lieux, et dès qu’on dénichait un spot, on organisait des soirées de nuit, les « Acid Karnage » ou le dimanche en journée, les « Acid Kermesse ». C’était des soirées à max 300 personnes, à la cool, avec toujours une ambiance unique, difficile à expliquer.
« Le stress de l’install de dernière minute, l’adrénaline de pas se faire choper, l’excitation lorsque le public arrive, les CRS qui débarquent avec la BAC et les chiens, les rencontres improbables.. Ce sont mes meilleurs souvenirs de teufs »
On a fait ça pendant 2/3 ans, après je me suis retirée, lorsque je suis partie m’installer à Paris. C’était vraiment atypique, et du coup on s’est souvent retrouvé dans des situations cocasses. Mais on en rigole aujourd’hui.
Quelles sont les collaborations marquantes de votre parcours ? Y a-t-il une scénographie qui vous rend particulièrement fière ?
Les projets qui m’ont le plus marqué, c’est le festival Créaparc, un festival dans un parc à Clamart en mai 2018, dont j’étais en charge de toute la scénographie alors qu’à l’époque je débutais. Je me suis retrouvé à devoir concevoir, fabriquer et réaliser la scénographie de 3 scènes et d’un kiosk, toute seule, gérer des bénévoles, travailler avec des techniciens (ce qui ne m’étais jamais arrivé) en parallèle de mon job alimentaire. Un projet colossal qui a un peu tourné au désastre lorsqu’une tempête nous est tombé dessus en plein montage, et que j’ai failli y perdre mon doigt.
L’expérience Créaparc m’a permise d’être armée pour mon second plus gros projet de l’année 2018 : Château Perché. Love Spec m’avais missionné pour m’occuper de la scénographie de 5 espaces sur le camping du festival. Je me suis retrouvée à devoir gérer une équipe de 40 bénévoles, et là c’était un autre level. Surtout que le montage et le démontage ont été un vrai cauchemar, à cause du manque de professionnalisme des organisateurs. Mais cela m’a beaucoup appris.
Sinon, un projet qui me rend particulièrement fière, ce n’est pas une scéno mais une commande. Une asso m’avait commandé en septembre dernier une licorne pour sa convention annuelle au musée des arts forains. Ils voulaient une licorne de 2m40 de haut, parce que « dans le monde de la startup, une licorne cela signifie qu’une startup a gagné plus d’un milliard d’euro ». J’avais 10 jours pour la faire. Je n’avais aucune expérience dans une telle construction en 3D, vu que je fais plutôt du psyché d’habitude. Imagine la pression, quand le client m’a appelé pour me dire qu’il voulait que je lui livre la licorne à l’Elysée, parce qu’il allait l’exposer sur le perron la veille de sa convention ! Mais finalement tout s’est très bien passé, et livrer à l’Elysée, c’est quand même un peu la classe.
Votre travail s’exerce essentiellement par le biais d’événements musicaux (musiques électroniques), quelles sont les autres sphères que vous ambitionnez d’explorer ?
Il est vrai que j’aimerais expérimenter d’autres sphères. Tout d’abord parce que je ne me ferme pas de portes, je suis hyper polyvalente (c’est mon côté Sciences po) et que j’ai une vraie soif de découvrir toutes les opportunités qu’offre le vaste monde de la scéno, mais aussi parce qu’aujourd’hui je ressens de la frustration dans ma créativité à cause du manque de budget des scénos que j’élabore. J’aimerais bien réaliser des scénos pour des événements corporates, ou dans le monde de la mode. J’ai réalisé une commande en janvier dernier pour une Fashion Week, et c’était un travail intéressant. J’ai également pour projet de créer des objets, simplement pour le kiff, pas dans un objectif de production et ensuite soit de les exposer, soit de les vendre, à voir.
Vous collaborez actuellement avec Itinéraire Bis pour l’Attrape Rave #3, quelques mots sur le projet ?
J’ai rencontré la team d’Itinéraire Bis lorsqu’ils ont organisé leur première soirée « Attrape Rave #1 » et qu’ils ont fait appel à Parallèle pour s’occuper de la scène principale. Je m’occupais de la scéno du coup. Ça s’est super bien passé, et ils ont décidé de continuer à faire appel à moi pour les suivantes.
J’avoue que c’est un peu un challenge pour moi à chaque nouvelle soirée, parce que je n’ai pas l’habitude de refaire une scéno au même endroit. Et l’atrium de la Rotonde, c’est pas le lieu le plus facile pour accrocher des éléments de décors. Mais c’est un réel plaisir de travailler avec Corentin et toute la team, vraiment !
Pour la suite, où pourrons nous vous trouver dans les prochains mois ?
Une installation interactive sur le thème de l’anamorphose pour la soirée de l’Agapê dans un lieu tenu secret, une scéno pour les soirées Radio pirate qui auront lieu en avril et mai sur une péniche, une scéno au Trabendo pour les 10 ans de l’association Coexister. En parallèle, je vais travailler sur des installations interactives au sein du Labyrinthe initié par Antoine de Ramdam, Come de Mic Mac et Alessia, un grand projet dont vous avez forcément entendu parler. Et puis, la saison des festivals se rapproche…
Merci à Constance de nous avoir accordé de son temps et dévoilé les backstages de ses belles créations. Talent à suivre ! En attendant, pour admirer ses oeuvres, rendez-vous le 9 mars, à la Rotonde, pour l’Attrape Rave #3.
– Accéder à son site –
– Accéder à l’événement –
– Accéder à la billetterie –
Ecrit par

Claire Lametri
En relation libre avec Paris, le bruit des machines, et les pizzas. Mais si je devais faire un choix, je me marierai quand même avec une pizza.